La Brazza Fashion Night 2015 organisée à Brazzaville du 07 au 08 août 2015 n’était pas qu’un défilé de mode. L’évènement organisé par le groupe Sorom Color, fondé et dirigé par Romaric Oniangué, a posé la réflexion sur la modernisation et l’exportation de la mode africaine.
Cloisonné et supporté par quelques happy few, la mode africaine doit sortir des sentiers battus. Fini l’époque où elle se confondait qu’au port d’un pagne Wax ou d’un autre tissu aux imprimés revalorisant l’Afrique. Dans la plupart des capitales africaines, la mode est entrée dans les mœurs. Créateurs, stylistes et artisans sont bel et bien sortis de l’ornière pour présenter des produits raffinés, aux standards établis par les professionnels. Mais, cet élan est encore loin de servir de véritable pôle économique capable de soutenir les économies africaines et de créer de la richesse.
À côté de son aspect culturel, l’évènement de Brazzaville a relancé le débat à travers trois tables rondes animées par des professionnels du secteur, économistes et dirigeants d’entreprises. Il s’agissait de répondre à certaines interrogations essentielles sur « l’avenir de l’industrie textile en Afrique », « comment moderniser et exporter le Made in Africa » et enfin « quel financement pour les industries créatives en Afrique ? ».
Sur la sellette, pour donner des éclairages sur les sujets, des acteurs comme Kennedy Eyenga, coordinateur marketing chez Vlisco, Maureen Ayité fondatrice de Nana Wax, Moulaye Taboure, co-fondatrice d’Afrikrea, Laura Eboa Songue, Co-fondatrice de Fashizblack et présidente cluster mode Afrique France, Rassas Nabil, directeur Esmond Tunisie, Elie Kuame, créateur haute couture et président du jury de la Brazza Fashion Night, Remy Bobiba, économiste à la Chambre de commerce international de Brazzaville, Vérone Mankou, fondateur de la société VMK, etc.
Des initiatives prometteuses
Les discussions ont montré que l’industrie textile et la mode peuvent résoudre la question d’emplois en créant des structures viables. Mais, il faut encore briser les nombreuses barrières à ce développement. Les gouvernements africains doivent prioriser le secteur, en l’aidant à se structurer. Un soutien qui doit sortir la mode africaine de son prisme artisanal. L’une des raisons du difficile accès au financement bancaire des entreprises de mode s’y trouve en effet. Les créateurs sont alors obligés de recourir aux établissements de microfinance, pas tout à fait commodes. Mais les professionnels doivent également s’organiser à travers des plateformes panafricaines pour trouver des solutions. Il s’agit également de mieux coordonner les Fashion Week africaines pour qu’ils n’empiètent pas les uns sur les autres.
Un exemple, Maureen Ayité
À côté des difficultés des initiatives encourageantes existent. Reconnu sous la marque Nana Wax, la Béninoise Maureen Ayité est sous les projecteurs. Elle rentre de paris en novembre 2012 après ses études en droit et lance sa marque Nana Wax. Avec 700 euros comme chiffre de départ, la société pèse aujourd’hui 240 000 euros de chiffre d’affaires.
« Les banques n’accompagnent pas les jeunes entrepreneures », regrette-t-elle. Devenue la source d’approvisionnement au Bénin de la marque Nana Wax, Maureen Ayité entend installer une succursale à Brazzaville, cette année.
Le numérique pour mieux vendre la mode africaine
Le numérique a bouleversé l’écosystème du secteur du marketing. La mode africaine peu bien y trouver des canaux de visibilité. L’expérience a été partagée par Moulaye Taboure, co-fondateur d’Afrikréa, plate-forme regroupant 300 créateurs dans 23 pays à travers le monde.
Elle assure la vente en ligne des produits des créateurs modélistes. Afrikréa, basée en France, réalise contre toute attente 2 milliards de francs CFA de transactions par an, avec une part de 5% sur chaque transaction. Aujourd’hui, la plate –forme Afrikréa compte nouer le partenariat avec l’Association Brazza Mode (ABM) qui regroupe de grands couturiers modélistes reconnu par l’Agence nationale de l’artisanat.
Parmi ces couturiers, Jacquot Moananga, dit maître Jacquot, diplômé de l’École internationale de coupe de Paris (AICP), lauréat du prix ciseaux d’or 2011 à Brazzaville. Installé à Bacongo, dans le 2ème arrondissement, Il fait de la confection vente depuis 1987. Parti avec un chiffre d’affaire de 500 millions de FCFA, maître Jacquot ne cache pas réunir environ 20 millions l’année d’entrée. Avec Afrikréa, il pense vendre plus !