Face aux inondations et érosions, Sassou N’Guesso recommande le reboisement

Dans son traditionnel message de vœux, le président Denis Sassou N’Guesso s’est appesanti sur une série de catastrophes naturelles qui frappent actuellement différentes régions du Congo à la suite des pluies. Pour le chef de l’Etat congolais, il n’y a pas mille solutions face aux inondations et aux érosions, il faut intensifier le planting d’arbres, une recette qu’il propose depuis 30 ans.

Denis Sassou N’Guesso explique dans son message de fin d’année que tout cela est le résultat du dérèglement climatique provoqué par les pays développés, mais qui ne veulent pas verser la compensation des dégâts causés. Pour le chef de l’Etat congolais, il ne faut plus rester les bras croisés au sein du bassin du Congo, mais agir. Le reboisement est l’action la plus efficace, est-il convaincu et le conseille à ses compatriotes.

C’est une vieille recette avec le début des champs d’eucalyptus dans les années 1980. Bien que 65% du territoire congolais sont sous couvert forestier, le chef de l’Etat, « l’homme des eucalyptus », affirme que le reboisement devrait se poursuivre. En réalité, il faut même le reprendre, car là où le peu d’arbres a pu pousser, tout à été ravagé. La forêt artificielle de Kintele, largement détruite par des réfugiés rwandais, reste toujours l’objet de convoitise en face de l’université Denis Sassou N’Guesso, ou à l’ancien poste de péage de Djiri.

Brazzaville exerce quotidiennement une vraie pression sur les petites forêts environnantes du Pool, notamment des districts d’Igné, de Goma Tsé Tsé, de Mayama et de Kinkala. La coupe sauvage de bois ne s’arrête pas. Les véhicules démesurément chargés de bois de chauffe et de charbon de bois passent tous les jours sans s’inquiéter aux postes de péage de Kintele et de Djoué où pourtant sont positionnées les brigades de l’Economie forestière. Cela veut dire que les populations se préoccupent plus de leur développement, de la lutte contre la pauvreté, que de la lutte contre le changement climat. C’est même une chance que la forêt de la Patte d’oie, de la Cité des 17 ou l’arboretum du stade Alphonse Massamba Débat subsistent encore avec cette collecte incessante de bois-énergie par les familles démunies de Brazzaville.

Des initiatives ne manquent pas

Il faut reboiser, recommande Sassou N’Guesso. En novembre 2011, le gouvernement avait lancé un Programme national d’afforestation et reboisement (PRONAR) qui visait de planter un hectare d’arbres dans le Pool, les Plateaux et la Bouenza. Le PRONAR qui a effectivement démarré sur le site de Ye, à une soixantaine de kilomètres au nord de Brazzaville, a nécessité 1,2 milliard de francs CFA pour sa mise en œuvre. Le programme s’achève en 2020, aucun bilan à mi-parcours. Pour l’instant, le Pool reste clairsemé de plaines, tout comme les deux autres départements. Jusqu’à son entrée au gouvernement en mai 2016 comme ministre de l’Economie forestière, Rosalie Matondo était la coordonnatrice du PRONAR.

Avant ce vaste programme, l’Etat a soutenu et financé d’autres petits projets tel que ECO (Eucalyptus du Congo) qui a permis de pavoiser sur plus de 2000 hectares, à l’entrée Est et Nord de Pointe-Noire (Patra, Mengo, Vindoulou, Mont Kamba) des eucalyptus. Les difficultés connues en 2003 par ce projet lui ont fait perdre ses acquis, notamment la vigilance sur ses plantations dont une bonne partie a été récupérée et détruite par les propriétaire terriens.

Grâce au Service national de reboisement (SNR), créé en 1989 sous les centres de l’Office congolais des forêts (OCF), le pays a pu bénéficier de massifs forestiers à Ignié dans le Pool, à Loudima dans la Bouenza, mais aussi à Ngouaha 2 dans le Niari où d’importantes expérimentations en matière de bois ont été menées par cadres congolais (l’ancien ministre Jean Prosper Koyo) et étrangers.

Il faut ajouter à toutes ces expériences, les politiques de gouvernance forestière mises en œuvre dans le pays. Le nouveau code forestier adopté fin 2017 renforce la rigueur dans l’exploitation des forêts, y compris les exigences de l’accord APV-FLGT passé entre le Congo et l’Union européenne pour sévir contre le bois trafiqué et non certifié.

En plus, tous les 6 novembre, une cérémonie officielle et populaire est consacrée à planter les arbres. Le président et tout se gouvernement se mobilisent pour le planting d’arbres tant à Brazzaville que dans les départements, comme dans le district de Ngo en 2018. Plusieurs essences non fruitières ont été plantées dans le district d’Oyo, le long de la RN2. Bien avant, les populations de Nkayi dans la Bouenza ont intériorisé l’habitude de planter les acacias qu’elles utilisaient ensuite comme bois-énergie. Le chef de l’Etat est lui-même devenue au fil des années un défenseur de l’environnement par le reboisement.
Et pourtant, tout cela n’a pas permis de mettre le Congo à l’abri des impacts du changement climatique. Ces dernières années, les grandes chaleurs et la grosse pluviométrie ont changé les habitudes des populations. Les zones jusque-là considérées comme inattaquables par les eaux et les érosions comme Bifouiti à Makelekele sont à la merci des glissements de terrain.

En début des années 1970, une étude avait pourtant prévenu que les occupations de terrain et les constructions anarchiques sur certaines zones à Brazzaville étaient périlleuses. Ces conclusions n’ont pas été suivies par les populations qui ont tout occupé, surtout à partir de 1992, mais aussi l’Etat qui n’a pas hésité à y ériger des écoles (cas du lycée scientifique de Djiri, voire l’université Denis Sassou N’Guesso), des centres de santé comme à Itsali ou les routes comme à L’Ombre, totalement englouties par les sables.

Dégâts et pleurs causés par les pluies

Les pluies de ces derniers mois ont causé d’importants dégâts matériels et tué au moins trois personnes, notamment dans le département de la Likouala. Selon une dernière estimation établie par les autorités, plus de 180.000 personnes ont été frappées par ces pluies dans quatre départements nord du Congo. La montée des eaux a atteint un niveau jamais enregistré depuis 20 ans dans ces régions. Les crues du fleuve Congo et ses affluents qui ont détruit les plantations, l’élevage les habitations et autres services ne vont pas se baisser maintenant. A Brazzaville et dans le sud du pays où il continue de pleuvoir abondamment, les dégâts sont innombrables.

A Pointe-Noire et à Brazzaville, les deux principales villes qui comptent chacune plus de un million d’habitants, le phénomène d’érosion et de glissement de terrains devient très préoccupant. A côté des maisons inondées et abîmées, les pointes d’érosion menacent d’avaler les villas nichées sur les pentes, tandis que d’autres maisons ont déjà été enfuies dans les sables comme au quartier L’Ombre à Mfilou, actuellement en voie de disparition.

Avec leurs petits moyens, les populations essaient de retarder la furie de la nature en rafistolant les côtes et ruelles lézardées, mais qui tôt ou tard finira par avoir raison de ces efforts. Ce qui explique dans les quartiers de Brazzaville touchés par ces érosions un ras-le-bol permanent des populations qui n’hésitent pas à s’en prendre aux autorités par médias interposés.

Et pourtant, entre 2008 et 2010, lors des travaux de municipalisation accélérée à Brazzaville, le gouvernement a entrepris la construction des ouvrages d’art pour canaliser l’eau et maîtriser la furie de la nature. Malheureusement, nombre de ces collecteurs, routes et ponts ont été enfuis par les sables. C’est le cas du rond-point Mouhoumi à Mfilou, construit et reconstruit sans succès, ou la route de Ngamakosso qui n’a vécu que le temps d’une fleure.

Le réseau routier de la capitale est en pleine déconfiture. Le parc automobile de Brazzaville a quasiment quadruplé depuis la fin de la guerre de 1997. On estime actuellement à plus de 10.000 taxis et 5.000 bus circulant chaque jour sur les macadams de la capitale, et presque autant de véhicules privés. La réhabilitation ou le réaménagement de ces routes posent problème. Avec un budget de plus de 32 milliards de francs CFA en 2019 contre 29 milliards l’année précédente, la mairie de Brazzaville se distingue par le colmatage avec du ciment des voies bitumées. Une technique presque balayée à la première pluie.

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