L’avenir des nouveaux bacheliers est buté aux grèves à répétition de l’Université Marien Ngouabi
Près d’une semaine après la proclamation des résultats du baccalauréat technique et professionnel, et cinq jours après celle du Baccalauréat général, les nouveaux bacheliers qui ont célébré l’obtention du diplôme supérieur deuxième degré, ont désormais les regards tournés vers la poursuite de leurs études au cycle universitaire. Mais un dilemme se présente devant ces milliers de bacheliers: les grèves à répétition de l’université Marien Ngouabi, qui constituent une épine dorsale pour les anciens et nouveaux étudiants.
Que deviendront les 7 252 admis au baccalauréat technique et 40.375 pour ceux qui ont décroché le baccalauréat général ?
Car depuis plusieurs années, l’université Marien Ngouabi est en proie à des grèves récurrentes. A la base de la suspension des cours depuis plusieurs mois dans la première Alma mater publique congolaise, les revendications socioprofessionnelles liées entre autres au paiement des salaires, primes et indemnités du personnel, qui accumule plusieurs mois de traitements non versés. A cela se greffent plusieurs années impayées des enseignants vacataires.
Il va sans dire que ces grèves à répétition empiètent sérieusement sur la formation des futurs cadres du pays. Et pendant que les anciens espèrent un compromis entre le gouvernement et les plateformes syndicales de l’université Marien Ngouabi, pouvant déboucher sur la reprise des cours et l’organisation des examens, les « palins », espèrent qu’ils pourront sous peu se rapprocher des services administratifs de l’université Marien Ngouabi, dans le dessein d’initier des démarches d’inscription.
À l’évidence, l’université Marien Ngouabi est la seule à mesure de contenir au moins près de 80 % des nouveaux étudiants issus pour la plupart des familles à revenus moyens ou des milieux défavorisés, auxquels la République essaie tant soit peu de donner la chance, en créant les conditions qui leur permettent de bénéficier d’une formation adéquate.
Ces mouvements de contestation se manifestent par des grèves tantôt des étudiants, tantôt des enseignants et des chercheurs, ou tous à la fois, ce qui provoque des troubles plus ou moins violents pouvant même conduire à la fermeture des établissements, en passant par des années blanches, des années académiques invalidées et, in fine, à une baisse de la qualité de la formation à demi-teinte et de la recherche, à une mise à mal de la crédibilité et de la validité des diplômes délivrés, enfin, à la remise en cause de la qualité des hommes formés. Tout cela ruine les chances et perspectives de développement et trahit l’espérance que des populations entières placent dans l’enseignement supérieur et la recherche scientifique.
Les grèves à répétition réduisent considérablement les temps d’apprentissage, engendrent des années universitaires incomplètes, à demi-teinte et ne permettent pas une exécution normale des programmes d’enseignement.
Malheureusement, l’État peine à faire face à ses obligations régaliennes du moins au niveau de l’université Marien Ngouabi, où les problèmes d’ordre académique, social et administratif sont légions. Qui plus est, l’État, aujourd’hui confronté à la crise financière, peine à honorer ses engagements envers l’intersyndical de l’université Marien Ngouabi.
Pendant ce temps, une frange des nouveaux étudiants dont les parents ont une situation sociale plus ou moins aisée, pourront continuer à étudier hors du pays ou dans les universités privées du pays, une autre minorité à l’université Denis Sassou N’Guesso après admission au test d’entrée. Le sort du lot le plus important est tributaire de la fin de l’année académique 2023-2024. Dans ces conditions, les gouvernants devraient prendre la mesure des conséquences fâcheuses de ce lézardement endémique, pour sauver le temple du savoir, en contribuant à son fonctionnement efficient.
Dans le contexte actuel, les plus victimes collatérales des grèves à répétition à l’Université sont les étudiants, sevrés depuis 2018 de la bourse, avec répercussion sur leur situation sociale précaire au fil des années. Quoiqu’ils aient été contraints d’incruster cette réalité dans leur quotidien, pourvu qu’ils parviennent à atteindre leurs objectifs. L’assertion de l’historien burkinabè Joseph Ki-Zerbo n’a-t-elle pas son sens « une nation qui ne songe pas à l’avenir de sa jeunesse est une nation vouée au suicide».