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Le BAC congolais passe à nouveau son épreuve de fraude

Le gouvernement a procédé le 18 juin au lancement des épreuves écrites du baccalauréat général, au lycée de la Révolution, à Brazzaville. Le dispositif anti-fraude a été renforcé cette année pour pallier à tout incident, malgré les publications les plus hérésiques sur les réseaux sociaux, annonçant la fuite des matières. Le ministre de l’Enseignement secondaire, primaire et de l’Alphabétisation, Anatole Collinet Makosso qui espère à un BAC zéro fraude, a exhorté les candidats à ne se souvenir que de ce qu’ils ont étudié pendant l’année scolaire.

Plus de 74.200 candidats affrontent avec passion les épreuves du BAC. L’examen va durer quatre jours. Pendant neuf mois, les élèves se sont donnés corps et âme pour décrocher ce diplôme sanctionnant la fin du cycle secondaire et ouvrant la voie à l’université. Dans le pays, plusieurs personnes ont obtenu de l’emploi grâce à leur BAC.

En 2015, le BAC congolais avait été annulé à la suite d’une cascade de fraudes signalées dans la plupart des centres d’examen. C’était le phénomène de « Bébé Lili ». Deux ans après, en décembre 2017, les autorités ont créé toute une Direction de lutte contre la fraude scolaire. Au début, ce n’était juste qu’une cellule anti-fraude. Cet organe est rattaché et basé au ministère de l’Enseignement primaire, secondaire et de l’Alphabétisation. Il s’agit de l’un des ministères qui bénéficient d’un budget alléchant, malgré la crise. Cette année, par exemple, ce département dispose d’un budget de plus de 124 milliards de francs CFA.

Une bonne partie de cette enveloppe est orientée vers les examens dont le budget est chaque année en perpétuelle augmentation. Des dispositions sont prises pour pallier à toute fraude pendant les épreuves. D’abord, un superviseur anti-fraude départemental est nommé pour veiller à ce qu’aucun acte de fraude ne soit enregistré dans le département.

Un département du Congo peut disposer de plusieurs centres d’examen, comme dans la Bouenza où on compte 13 centres cette année, pour quatre lycées dont Mouyondzi le plus ancien. Le superviseur anti-fraude devra sillonner dans tous ces centres pour s’assurer que tout est à l’abri de la fraude.

Dans les centres, il y a également des superviseurs anti-fraude. Ils sont à demeure et ne quittent pas des yeux les agents de sécurité, les membres du secrétariat, les surveillants de salle et le jury lui-même. Les superviseurs anti-fraude sont totalement indépendants, jouissant de leur budget (frais de mission, carburant de véhicules réquisitionnés et imprévus) du dispositif d’un centre d’examen. Ils sont au dessus des jurys.

La fraude est certaine dans les salles d’examen. Dès qu’un sujet est dévoilé, les surveillants qui ont déjà reçu l’argent des candidats, s’activent à passer l’épreuve non traitée à travers les mailles de la sécurité, pour qu’elle soit résolue à l’extérieur du centre. Dans certains centres, ce réseau de fraudeurs implique le jury, les surveillants, voire les agents de sécurité. C’est le phénomène des laboratoires qui sont tenus par des enseignants, des étudiants ou d’anciens bacheliers. Il fonctionne bien et a déjà permis à plusieurs candidats de décrocher leur BAC.

Avec les nouvelles technologies, les solutions des épreuves arrivent directement par téléphone portable que les candidats utilisent comme calculatrices ou chronomètres. Avec la complicité des surveillants, les élèves recopient allègrement tout ce qui vient du dehors. C’est un travail de fourmis qui dépasse le simple cadre de la volonté d’un seul candidat d’être reçu à son examen.

Des écoles s’organisent, avec l’aide des parents, en mobilisant de l’argent, pour attirer les faveurs des surveillants et du jury. Les enfants qui ne cotisent pas, ne sont pas pris en compte par l’école. Dans certaines familles, en sus de l’argent donné à l’école, les parents garnissent les poches des enfants des billets de banque pour que ces derniers ne soient pas en « panne sèche ». Il paraît que les surveillants n’entendent que le langage d’argent.

Il faut aussi impliquer dans cette mafia scolaire, les agents de la Direction des examens et concours (DEC) qui assistent à la production et à la duplication des sujets. Ils sont dans le secret des dieux et souvent sont les premiers à tout déballer dans les rues, moyennant quelque espèces sonnantes.

Dans son engagement contre la fraude dans le milieu scolaire, le gouvernement a interdit l’accès des cartables, des documents, des téléphones portables et autres appareils électroniques en dehors de calculatrices assermentées, dans les salles d’examen. Les candidats sont systématiquement fouillés, palpés et parfois déchaussés ou déshabillés avant d’accéder dans la salle. Les proviseurs qui sont logés dans les lycées avec leurs familles, sont expulsés du centre durant les jours de l’examen.

A la suite de l’incident de juin 2015, un BAC qui n’avait connu que 10% de taux de réussite, des agents de l’Etat, soupçonnés d’avoir occasion des fraudes massives, ont été déférés à la maison d’arrêt de Brazzaville. Jusqu’à ce jour, aucun procès n’a pu avoir lieu, on ignore tout de la situation de ces présumés coupables. En 2014 déjà, le BAC avait fait flop, avec cette fois-ci des fuites parties de Kimongo, pour venir se déverser à Dolisie.

Selon la loi scolaire congolaise, un candidat surpris en flagrance de la fraude, écope de quatre à cinq années sans passer l’examen. Son nom est écrit au rouge dans les registres de la DEC. Cette année encore, le BAC congolais passe à nouveau son épreuve de fraude.