L’hebdomadaire congolais, « Le Troubadour » a été suspendu le 13 septembre pour une durée d’un mois par le Conseil supérieur de la liberté de communication (CSLC), pour entre autres « usage des moyens déloyaux pour obtenir des informations ou des documents ». Le CSLC s’est particulièrement attaqué au journal suite à sa dernière parution mettant à mal le gouvernement. Le Troubadour avait déjà été averti.
La décision dont copie est parvenue à Vox a aussitôt été notifiée au directeur de publication de ce canard, François Bikindou qui ne devra pas paraître les trente prochains jours, « sous quelque forme que ce soit ». Selon le Conseil supérieur de la liberté de communication, le contenu de l’article intitulé « Clément Mouamba préside un conseil de cabinet contre…la lutte contre les anti-valeurs voulue par le chef de l’Etat », a été obtenu par des moyens illégaux.
Dans cet article, le journal est abondamment revenu sur la conférence de presse animée une semaine auparavant par le chef du gouvernement, au sujet justement de la lutte contre le corruption. Le Premier ministre n’avait pas apprécié, à cette occasion, l’attitude de la Commission anti-corruption présidée par l’ancien ministre Lamyr Nguele, qui n’a pas hésité de balancer certains membres du gouvernement Mouamba dans son rapport devant la presse. Clément Mouamba avait en effet appelé la Commission et son président à faire preuve de « maturité » en ne citant pas de noms de hauts responsables suspectés dans les actes de corruption.
Le journal Le Troubadour en a fait tout un dossier dans sa dernière parution dont la Une a été présentée en début de semaine par son directeur de publication sur les réseaux sociaux. Cette satire contre le Premier ministre n’a pas contenté le CSLC et son président Philippe Mvouo qui a décidé de suspendre le journal. Il a requis l’autorité du procureur de la République près le tribunal de grande instance de Brazzaville et celle de la force de l’ordre pour veiller à ce que Le Troubadour ne paraisse pas dans les délais indiqués dans la décision du CSLC.
Le Troubadour a déjà été averti pour ce genre de pratiques. Il s’agit pour le CSLC d’une récidive « dans l’inobservation des normes éthiques et déontologiques ». Le 3 septembre dernier, le CSLC avait interpellé l’hebdomadaire pour lui signifier ses fautes. Mais la rédaction est passée outre, certainement tenaillée par l’envie d’informer le public.
Présumé canard proche du gouvernement, et notamment des services de la police, le Troubadour s’est notamment illustré ces dernières années par la publication des informations dont aucun journaliste ne pouvait avoir accès. Les affaires de police, les arrestations et détention des acteurs politiques, les des prisonniers à la Direction générale de la surveillance du territoire. (DGST) ou les enquêtes menées par les services de police ont, contre toute attente, été révélées dans ce journal, pourtant pas spécialisé dans l’investigation.
Toujours est-il, la liberté de la presse a été menacée au Congo par cette suspension. Quelque soit la faute commise, le CSLC ne devrait pas se fatiguer de faire de la pédagogie. Suspendre un journal relève de l’arbitraire en démocratie, même si le CSLC se basait sur des textes pour prononcer ses décisions. Mais, dans leur majorité, les journalistes n’adopteront jamais ces textes qui visent en réalité à déstabiliser le quatrième pouvoir.