Les autorités ont reconnu, à la suite d’une liste publiée le 12 juin, 55 formations politiques conformes à la loi de 2017 sur les partis politiques. Cette reconnaissance ne suscite pas seulement une vague de contestations au niveau des partis de l’opposition dont les radicaux n’ont pas été reconnus, mais également appelle à une analyse plus apaisée.
La liste de 55 partis politiques a été signée par le directeur général de l’administration du territoire, Jacques Essissongo et Vox s’est procurée une copie. Aucune raison n’a été évoquée sur le document pour justifier cette sélection des partis, alors que le Congo en compte plus de 200. Mais d’après le ministre de l’Intérieur et de l’Administration du territoire, Raymond Zephyrin Mboulou, dans une communication animée face aux leaders des partis le 12 juin à Brazzaville, l’article 50 de la nouvelle loi sur les partis exige essentiellement que la formation politique soit représentée sur l’ensemble du territoire national.
Dans sa critique, le ministre Mboulou a même dénoncé des partis qui n’existent que dans le village de leur fondateur et dont les adhérents se trouvent être les membres de leur famille resserrée (épouse et enfants). Ces partis-mallettes n’ont souvent pas de siège et ne sont pas connus dans la plupart des départements du Congo. Pour le membre du gouvernement, il faut que les petits partis arrivent à fédérer afin qu’ils soient crédibles et efficaces dans leur action. Il est cependant resté ferme en annonçant l’interdiction des partis qui ne respecteront pas la législation en vigueur.
Cette annonce a suscité une volée de bois vert au sein de la classe politique congolaise. Si à la majorité présidentielle les grincements de dents ont été très discrets, à l’opposition par contre les voix se sont diversement élevées. Pour Clément Miessara du Parti social démocrate congolais (PSDC) qui n’a pas été reconnu, cette décision du gouvernement ne le concerne guère. « Cette décision vise à discréditer l’opposition auprès des populations. Mais nous ne sommes pas concernés par cette mesure, et de toutes les façons, cela ne nous surprend pas », affirme-t-il.
Les opposants qui se sentent directement visés par cette mesure, invoquent l’article 2 du Code civile en vigueur au Congo, stipulant que la loi ne dispose que pour l’avenir et qu’elle n’a pas d’effet rétroactif. Ce qui devrait sous-entendre que les partis comme le PSDC créé depuis la Conférence nationale ne devraient pas être secoués par une telle mesure. Et pourtant, l’administration du territoire ne les a pas retenus sur sa check-list.
Le Mouvement pour l’unité, la solidarité et le travail (MUST) de Claudine Munari n’a pas vu son nom apparaître. Bien qu’elle soit une figure de prou de l’opposition congolaise, car placée à la tête d’un cartel de partis et associations politiques dénommés Fédération de l’opposition congolaise, elle n’a pas été retenue. De même l’Union patriotique pour le renouveau national (UPRN) de Mathias Dzon n’existe pas sur la liste du gouvernement. C’est depuis son séjour en France que ce leader devrait apprendre la cessation des activités de son parti pour non-conformité à la loi. Beaucoup d’autres partis aussi n’ont pas été reconnus. Vont-ils entrer en clandestinité ou bien vont-ils s’adresser à l’administration pour se régulariser ? Le ministre Mboulou a d’ailleurs indiqué que le processus n’était pas clos, tant qu’il y a des partis qui vont se créer.
C’est certainement dans cet élan que six formations politiques, UDH-YUKI de Guy Brice Parfait Kolelas, Alliance patriotique des républicains du Congo (APRC) de André Kamba, Parti du peuple (PA.PE) de François Xavier Ongandou, Parti pour le progrès social (PPPS) de Pascal Ndinga Ompiero, Parti pour l’unité, la liberté et le progrès (PULP) de Médard Moussodia ou Dynamique pour la nouvelle éthique républicaine et la démocratie (DNERD) de Crépin Ngouala, ont pu être sauvées de justesse. Elles n’étaient pas sur la première liste de 49 partis politiques annoncés à l’hôtel de la préfecture.
Effectivement sur la première liste, beaucoup de partis satellites non représentés sur l’ensemble des départements du Congo ont été pris en compte. Une décision qui pourrait être interprétée comme deux poids deux mesures, une justice à double vitesse. C’est le cas du Front uni des républicains congolais (FURC) de Raymond Timothée Mackitha, du Congrès pour la démocratie et la république (CDR) de William Bouaka ou du Comité d’action pour le renouveau (CAR) de Clotaire Mboussa Ellah. Ils ne sont connus que par leurs propres fondateurs ainsi que dans leurs propres milieux. Les Congolais lambda ignorent tout de l’existence de ces partis.
D’autres formations reconnues par l’Etat ne sont en fait que le reflet de leurs leaders, parfois ministres ou députés, sinon dans le fond, ils ne sont rien aux yeux des Congolais. Il s’agit par exemple du Front patriotique de Hermella Doukaga, la Chaîne de Joseph Kignoumbi Kia Mboungou, Mouvement pour la démocratie et la paix (MDP) de Jean Claude Ibovi ou l’Union des démocrates et des libéraux (UDLC) de Gaspard Kaya-Magane. Des partis en réalité qui ne sont que l’ombre d’eux-mêmes, ils n’existent que dans les « fiefs » de leurs présidents-fondateurs.