Close

Les défis des prochaines élections

Le Congo organise le 16 juillet le premier tour des élections législatives et locales. Ces scrutins de proximité comportent de nombreux défis, tant dans la mobilisation des électeurs, que dans leur déroulement dans des conditions optimales. Les populations ont toujours estimé que les élections étaient un grand moment de présenter leurs doléances à ceux qui aspirent gérer la cité. La Rédaction de Vox Congo va publier une série de reportages sur les problèmes des populations qui vivent dans les périphéries de Brazzaville, la ville-modèle du Congo.

On organise les élections pour améliorer la gouvernance, et permettre le bien-être des populations. Voter utile, c’est voter pour faire changer les choses au quartier ou au village. Glisser une enveloppe dans l’urne, c’est remettre son destin entre les mains d’un leader pendant une longue période, celle de la mandature.

Les défis sont énormes pour ces élections. Après une élection présidentielle de mars 2016 entièrement réussie, concernant la mobilisation des électeurs, il faut attendre voir que ces législatives et les locales fassent le plein d’électeurs dans les bureaux de vote. Entre 2002 et 2012, les Congolais avaient boudé les urnes, avec des élections dont les taux de participation atteignant à peine le seuil de 10%, selon les observateurs de la société civile et de la CEEAC. La relance de 2016 a été un vrai acquis. La plupart des Congolais s’étaient rendus aux urnes. Il s’agit à présent, pour l’administration électorale et les partis politiques, de rééditer cet exploit.

L’opération de révision des listes électorales a été très express, si bien que des électeurs potentiels ayant atteint cette année l’âge de la majorité n’ont pu être enrôlés. Cette opération ne s’est déroulée que dans les chefs-lieux de communes et de districts. Les populations de villages lointains devant rallier les grands centres administratifs pour espérer porter leurs noms sur les listes électorales.

A ce niveau, le corps électoral, estimé en 2016 à quelque 2,1 millions d’électeurs pourrait ne pas être modifié. Ce qui ferait que les 5.380 bureaux de vote resteront en place. Sauf, si ceux du département du Pool, région en proie à de grandes violences, ne sont pas retenus. C’est aussi l’un des grands défis, car certaines formations politiques comme le Parti congolais  du travail (PCT), ont maintenu leurs candidats dans ces zones en conflit.

Si au sein de la majorité présidentielle, les partis s’efforcent à garder leur unité, à l’opposition le défi d’aller en rangs serrés a déjà volé en éclats. Outre ceux du Collectif des partis de l’opposition qui ont choisi ne pas y aller, les candidats de l’opposition militent chacun dans la limite de son parti.

Par ailleurs, les femmes sont déterminées à remplir le quota de 30% des sièges que leur reconnait la loi électorale. Mais, comme cela n’est pas gagné d’avance, la lutte est âpre au sein des partis politiques. D’abord, pour la validation des candidatures féminines, ensuite pour le positionnement sur les listes électorales. Avec seulement 7% des parlementaires dans les assemblées sortantes, les femmes espèrent faire mieux en 2017, en relevant le défi d’une grande participation des femmes votant pour les femmes. Au Congo, les femmes représentent 52% de la population nationale, mais elles ne constituent même pas le tiers des élus dans le pays.

Après, les attentes des populations. Nombreux ont développé au fil des années un dégout pour le vote. Car, l’élection n’est pas encore le moyen par lequel il faut changer les conditions de vie. Dans les périphéries de Brazzaville, à Nganga Lingolo, à Ntoula, à Kibina, à Ngampoko, à Moutabala, à Mambou, à Domaine, à Jacques Opangault, à Ngamakosso ou à Kintele, les électeurs vivent dans des conditions difficiles. Il est impossible de croire qu’ils habitent réellement Brazzaville.

Dans la série de reportages réalisés par Vox, ces populations expriment leur mépris pour les élections. Elles posent les vrais problèmes de vie quotidienne. Elles se eontent abandonnées de leurs élus qui ne reviennent qu’en fin de législature pour solliciter un autre mandat. Les questions de routes, de santé, d’eau, d’électricité, d’insécurité et d’éducation se posent sérieusement dans ces quartiers déconnectés du centre-ville. Le rôle du député et du conseiller n’est pas de construire les ponts ou les écoles, mais c’est de décrocher des projets avec des financements publics pour la construction des ponts, des routes, des écoles et des lignes électriques pendant la session budgétaire. Ce que ne font pas les élus, d’après les plaintes des populations.

Finalement, les élus ne vont à l’Assemblée nationale que pour leur propre ventre ? C’est possible. Au Congo, les indemnités mensuelles payées à un député varie entre 4,5 et 6 millions de francs CFA.  Dans un pays en crise financière, une telle situation ne peut que faire courir. Et ce n’est pas tout. A chaque session parlementaire, les députés sont gratifiés d’une somme de 1,2 million de francs CFA, comme émoluments.

Les présidents des commissions jouissent des privilèges : une voiture, une garde et une indemnité de 6 millions de francs CFA.

Une fois que le travail est fait à l’hémicycle, l’institution trouve les moyens financiers aux élus pour organiser les descentes parlementaires. Combien y vont ? Mais la note est de 5 millions de francs CFA par élu. Il y a à boire et à manger au parlement. Des sommes faramineuses qui donnent certainement des vertiges à ceux qui les perçoivent, au point d’oublier les problèmes des populations. Au Gabon, un député touche 3 millions de francs CFA, alors qu’au Cameroun, ils sont à 800.000 francs CFA.

Nombreux, pour tenter de compenser, construisent des ponts, des écoles, ou paient des enseignants vacataires dans les écoles. D’autres, distribuent de petites enveloppes de quelques billets de banque aux femmes du quartier ou aux personnes âgées. Les défis des élections restent entiers.