Des jeunes s’en sortent en recyclant les pièces de véhicules à Brazzaville
Plusieurs jeunes de Brazzaville sans emploi ont choisi de revendre des vieilles pièces de véhicules pour faire face au chômage. Ils squattent les espaces publics, aux abords des marchés et des magasins, pour proposer au premier venu toutes sortes d’articles mécaniques et espérer rentrer le soir avec une recette de parade à la crise.
« Il n’y a pas de sots métiers. Après de longues études à l’université, c’est ici que j’ai chuté », ironise sèchement un jeune revendeur de pièces de rechange sur les trottoirs du marché « Commission », à Bacongo.
Ils sont nombreux ces jeunes congolais qui le mettent en pratique au lieu de rester à la maison à ne rien faire. « Il faut créer », clament-ils à ceux qui s’étonnent de les voir s’activer ainsi pour gagner leur pain.
Créer ! Dans le jargon des jeunes bricoleurs, cela signifie exercer une activité hors du commun. Guy Samoueno compte parmi ceux qui ont compris qu’il ne faut pas attendre d’aller travailler dans les bureaux pour gagner sa vie. Depuis dix ans, il s’est constitué dans le business d’achat de pièces détachées de véhicule qu’il revend au marché « Commission ». Une affaire qui marche bien pour lui qui avoue ne pas « envier un fonctionnaire de l’Etat ».
Les véhicules en panne ou totalement irrécupérables leur sont proposés par des fournisseurs souvent étrangers. Des Maliens, mais aussi des Congolais. A défaut de l’achat d’une voiture en panne, les jeunes revendeurs font parfois des commandes de pièces d’occasion. Elles proviennent du Nigéria ou de République démocratique du Congo. On les trouve aussi sur place à Brazzaville. Il s’agit des pare-chocs, des amortisseurs, des phares et veilleuses.
Un pare-choc neuf est vendu à 70.000 francs CFA, alors qu’en occasion on peut l’avoir à 35.000 francs CFA. Une méthode appréciée par certains détaillants, car la différence des prix n’est pas trop ressentie. Par mois, un vendeur des pièces d’occasions auto peut acheter trois à quatre voitures en panne.
Les prix diffèrent selon la marque de voiture, précise Guy Samoueno. Le mini-bus Hiace irrécupérable est vendu à 600.000 francs CFA. Une Rav4, ancien modèle et en panne avec presque toutes les pièces, est vendue à 250.000 francs FCA. Le commerçant qui revend les pièces peut encaisser 400.000 voire 500.000 francs CFA, soit un bénéfice de plus de 100%. « Lorsque je vends bien et que j’achète les voitures à des prix bas, j’ai un bénéfice de plus de 200.000 francs CFA par voiture. Un business que j’aime, parce qu’avec ça, je nourris bien ma famille et mes enfants vont à l’école », confie un autre commerçant de pièces détachées.
A Brazzaville, la vente de voitures en panne ne se fait que dans un commissariat de police. Ceci, pour plus de sécurité et pour des raisons « de professionnalisme », affirment les revendeurs. Le propriétaire de voiture se rend avec le commerçant intéressé par l’achat dans un commissariat de police. Ce dernier lui remet la carte grise de la voiture et les deux signent une attestation de vente devant l’autorité policière. Cette attestation s’obtient moyennant une somme de 15.000 francs CFA. Après cette opération, le commerçant peut alors récupérer la voiture pour un garage où commence l’opération de détachement de pièces.
Ces articles finiront dans un marché de la place. « Plusieurs Congolais comme moi exercent ce métier et procèdent de la sorte », raconte un habitué de ce business, avant d’ajouter : « lorsque la voiture est totalement défaite, la carcasse qui reste est revendue aux tôliers pour une somme parfois de 50.000 francs CFA. Elle peut servir à la fabrication des seaux et autres objets métalliques ».
Mais ces jeunes débrouillards doivent faire face aux agents de la mairie qui les déguerpissent régulièrement pour occupation anarchique de l’espace public. « Nous sommes en face d’une catégorie d’individus qui causent des problèmes chaque jour en occupant la voie publique avec des carcasses ou des épaves de voitures même lorsque c’est interdit. Le minimum qu’on leur demande, c’est de garder l’espace propre et de ne pas occuper les avenues », affirme un conseiller technique à la mairie de Bacongo.
Ces plaintes datent de plusieurs années au point que la mairie de Bacongo a pris une note circulaire à l’attention des vendeurs des pièces détachées d’automobiles installées dans les grandes artères de cet arrondissement. « Nous avons envoyé́ plusieurs fois cette note de mise en garde. La dernière en date du 2 mai 2015 demande aux vendeurs d’enlever, sans délai, les épaves et autres déchets qui encombrent l’avenue Simon Kimbangou à Bacongo et d’assurer en permanence la propreté́ des lieux occupés », tempête le conseiller technique.