La dame le fruit qui n’est plus d’actualité  

La dame, fruit du damier, a vu sa valeur s’effriter au fil des temps. De forme ovale, de la taille d’un citron à peu près, de couleur jaune, avec un intérieur rose foncé ou pâle rempli des fibres, au goût sucré aigre avec un noyau dont l’amande était la partie finale, la meilleure. A l’époque, c’était presque un luxe d’avoir un damier à la maison. Mais la dame ne se vendait nulle part. Elle se ramassait juste.

Loin d’être un dessert, la dame était considérée comme un fruit de passe- temps.  Elle se consommait plus à des circonstances particulières, telle que lorsqu’on s’ennuyait quelque part et qu’on le voyait traîner à même le sol juste à ses côtés. Alors on n’hésitait pas à le ramasser. Le moment favori de tous, c’était en cours de route où elle jouait le rôle de fidèle compagnon vu qu’on avait des damiers tout le long des avenues goudronnées. Chutant de l’arbre les dames tapissaient les trottoirs et salissaient la chaussée, puisque les véhicules ne pouvaient s’empêcher de les écraser au passage.

On a surpris des personnes de tout âge oublier leur carrure, s’abaisser pour ramasser ce petit fruit afin de le savourer sans même prendre le soin de le laver. Il suffisait pour les femmes de l’essuyer en le frottant contre son pagne avant de le manger.  Les hommes avaient l’habitude de commencer par le frotter des deux mains, souffler dessus, avant de le porter à la bouche. Comment savoir ces aînés-là, au lieu de se débarrasser du noyau, n’allaient pas le casser loin de tous les regards pour en savourer l’amande prisée de tous. Ça réveillait des souvenirs après tout.

On retrouvait également le damier dans des établissements scolaires. Là- bas, les écoliers et écolières, sans laver la dame que les filles essuyaient avec leur jupe, la mangeait à temps voulu : à l’arrivée, pendant la récréation et à l’heure du départ pour la maison. A cette heure de fin des cours, il y en a qui en ramassait autant que possible pour aller faire la fête des amandes à la maison. Aussi, ces fruits, se retrouvaient-ils, au fond des cartables, salissant parfois les cahiers dépourvus de couvertures. Au  primaire, les réputés de l’école buissonnières passaient leur temps  à casser les noyaux (entre deux pierres assez solides) pour en récolter les amandes pendant que les collègues étaient en classe.  Mais casser le noyau était un art. Il fallait de l’expertise pour ne pas l’écraser et de surcroît, manquer de sortir l’amande en entier et l’émietter.  C’était un défi, un vrai duel qui se faisait entre copains.