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L’Etat tient à relever le défi du CFCO

Le gouvernement a noté, le 26 août à Brazzaville, à l’issue du conseil des ministres, la nécessité de relancer le trafic ferroviaire entre Brazzaville et Pointe-Noire. Le Chemin de fer Congo océan (CFCO) constitue, grâce à ses trains,  l’épine dorsale de l’économie congolaise. Malgré la présence de la route lourde entre les deux principales capitales du pays, le CFCO demeure l’unité de transport la plus confortable en terme du nombre et de volume marchandises.

« La nécessité de la remise en service du Chemin de Fer Congo Océan (CFCO), axe de communication majeure pour notre économie et pour nos populations, infrastructure, hélas, trop souvent prise en otage par les bandits armés à la solde de monsieur Frédéric Bintsamou, alias Ntumi, ainsi que la sécurisation de la route lourde Pointe-Noire/Brazzaville », peut-on lire dans le compte rendu du conseil des ministres du 26 août.

La compagnie nationale de chemin de fer congolais, le CFCO, est en déraillement permanent dans le Pool, depuis beaucoup de mois, causant ainsi une énorme perte à l’Etat. Le CFCO pouvait, mobiliser en son temps fort, près de 100 milliards de francs CFA de recettes annuelles. Aujourd’hui, avec le transport de quelque 600.000 passagers et environ 900.000 tonnes de marchandises, le CFCO doit encore faire mieux pour atteindre ses meilleures performances. La concurrence de la RN1 devrait encore serrer les plans pour le CFCO qui a perdu son rayonnement auprès des clients.

Le CFCO est en effet aligné comme l’une des plus importantes entreprises du portefeuille public (SNE, SNDE, STPU, PEFACO hôtels, SNPC, BCH,..). Au titre de l’année 2017, ces entreprises devraient au moins rapporter quelque 5 milliards de francs CFA, selon la direction générale du Portefeuille public.

La contribution du CFCO est quasiment inexistante, car l’entreprise est paralysée, victime des attaques sauvages et à répétition dans le Pool où les forces de sécurité et de l’armée combattent les miliciens Ninjas du pasteur Ntumi. Le train ne siffle plus dans le Pool. Les commerçants sont obligés d’utiliser le transport routier pour leurs marchandises en destination de Pointe-Noire ou de Brazzaville, les deux principales villes du pays.

Les usagers et les riverains du chemin de fer au PK Mfilou à Brazzaville, se plaignent. « Ici, tous les jours les trains passaient. Nous étions habitués à cette ambiance. Nous ne comprenons pas ce qui se passe dans le Pool. Il y  avait toujours une foule de voyageurs qui venaient prendre le train ici à Mfilou, notamment le train Air Pool, dit Train du peuple », regrette avec nostalgie un riverain du chemin de fer, habitant le quartier Mbimi.

Depuis l’arrêt du trafic ferroviaire entre Brazzaville et Loutété, les trains du CFCO ne circulent que de Pointe-Noire à Loutété. Ce trafic n’est pas rentable concernant les marchandises. En dehors du ciment de la SONOCC à Loutété, le sucre de la SARIS à Nkayi, le CFCO se contente de quelques rares voyageurs. D’où la baisse drastique de ses recettes. La compagnie ferroviaire n’est plus capable de payer ses agents dont les arriérés des salaires s’accumulent depuis de longs mois.

Mais le CFCO demeure potentiellement efficace. Le bois qui quitte la Sangha ne devrait pas arriver à Pointe-Noire par route. Faute du trafic ferroviaire, même le carburant, le gaz, les vivres frais sont acheminés dans la capitale par route, en de quantités très insuffisantes, favorisant parfois des pénuries et des flambées des prix des denrées de première nécessité.

Le CFCO n’est pas que victime de problème sécuritaire dans le Pool. Depuis l’éclatement en 2001 de l’Agence transcongolaise de communication (ATC), le CFCO comme le Port de Pointe-Noire et le Port autonomes et secondaires de Brazzaville sont devenus des entités économiques individuelles. Seul le port de Pointe-Noire résiste à cette mutation. Le CFCO devrait être cédé à des privés, mais le processus de sa privatisation n’a pas abouti au début des années 2000. Les consortiums sud-africains, américains, chinois ou italiens n’ont pas réussi à conclure pour la reprise du CFCO.

Dans sa soif orgueilleuse de conserver le CFCO, l’Etat avait prévu injecter quelque 30 milliards de francs CFA pour relancer la compagnie ferroviaire. Une allocation qui n’est jamais arrivée. Mais le gouvernement avait finalement décidé d’acheter quelques locomotives de ligne (CC-800 de Chine) et des voitures voyageurs (Train Océan fabriqué en Corée pour 10 milliards de francs CFA). D’autres voitures voyageurs venues d’Afrique du sud en 2015 n’ont pas encore été mises en service.

Le budget du CFCO s’est progressivement déprécié ces cinq dernières années, faute d’un trafic consistant et régulier. Il était de 40 milliards de francs CFA en 2012, avant de tomber à 35 milliards en 2014, puis à 32 milliards en 2015. Depuis, l’entreprise n’a presque plus adopté de budget, faute d’activités réelles.

La réhabilitation de la voie ferrée, vieille de plus de 80 ans, est un grand défi. Selon le Plan national des transports, les partenaires italiens devraient réhabiliter depuis 2015 les 515 Km du CFCO, entre Brazzaville et Pointe-Noire. Très souvent, les locomotives et les wagons voyageurs modernes ne s’adaptent plus à l’écartement de la voie CFCO. C’est pourquoi l’acquisition de nouvel équipement est toujours assujettie à des adaptations dans les ateliers du CFCO au KM4 à Pointe-Noire.

De toute évidence, tant que la capacité opérationnelle du CFCO ne sera pas dans les priorités du gouvernement, il serait difficile d’envisager l’exploitation des gisements miniers que les Congolais attendent de leurs vœux. Le transport de ces mines de fer levés dans le Niari et dans la Lékoumou, ou des polymétaux exploités dans la Bouenza et le Pool dépend du rail.

Pays de transit depuis l’époque colonial, le Congo se doit de garantir une meilleure capacité d’exploitation au CFCO. Cette entreprise constitue son épine dorsale. Le CFCO assure le trafic des produits développés dans tous les secteurs de l’économie. C’est-à-dire, les produits pétroliers et hors-pétrole sont tributaires du trafic ferroviaire.