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Le marché du gaz à Brazzaville, un véritable yoyo

Le gaz butane qui sert de  combustible pour plusieurs ménages à Brazzaville est devenu  rare sur le marché. Les principaux dépôts d’approvisionnement profitent de la rareté du produit  pour marchander et spéculer sur les prix. Les gérants de dépôts jouent au yoyo avec les petits clients qui ne peuvent pas verser « un pourboire costaud ».

La capitale congolaise est confrontée à une pénurie de gaz depuis plusieurs mois. Chaque jour, plus d’une centaine de personnes  se ruent dans les dépôts de gaz. Leur déception est grande et quotidienne. Les ménages subissent des caprices de revendeurs. Les livraisons se comptent sur les bouts de doigts à travers la ville.

La pénurie de gaz qui s’est accrue avec l’interruption du trafic ferroviaire a engendré un véritable business pour les vendeurs de gaz. Actuellement, hormis  les gros distributeurs officiels,  une bouteille de  12 kg dans les autres dépôts est vendue  à 9.500 francs CFA, tandis que celle de 20 Kg  est à 18.000 francs CFA. Officiellement, une bouteille de gaz de 12 Kg est vendue à 5700 francs CFA et celle de 20 Kg à 9500. Des prix qui ne sont plus respectés, même dans les dépôts reconnus, où les prix sont fantaisistes : 7500 francs CFA pour les 12 Kg et 12.000 francs CFA pour les 20 Kg

Le marché de gaz est devenu un véritable yoyo. Les gérants se passent pour des incontournables qui encaissent des sous à tout moment. Ils font de la spéculation sur le produit qui est pourtant disponible à Pointe-Noire. Les clients sont depuis un moment les dindons de la farce.

Les autorités, parfois incapables de faire respecter la loi sur les prix, coopèrent avec les gérants. Elles sont les premières à payer plus en défaveur des populations qui se lèvent tôt devant les dépôts de gaz. La rareté du produit devrait pourtant inquiéter.

Le sous-sol congolais renferme d’énormes réserves de gaz. Les sociétés pétrolières Eni Congo et Total E&P Congo ont récemment fait de grandes découvertes à ce sujet. Ce qui explique la présence permanente du gaz à Pointe-Noire. Il suffit simplement pour les autorités d’organiser le trafic du gaz entre Pointe-Noire et Brazzaville à travers les moyens appropriés.

Chantage et inflation autour du gaz

Une livraison a eu lieu le 13 février au dépôt « Faaki » situé  dans les environs du rond-point de Moungali. Un camion arrive à la mi-journée, avant même que l’on  décharge  les bouteilles de gaz, les gens de mon quartier couraient  en disant « il est là » avec leurs bonbonnes sur la tête, déclare un client de gaz et ami  du gérant.

Depuis trois semaines, les ménages à la recherche de gaz butane faisaient des allers-retours au dépôt pour s’enquérir des dates de livraison du gaz. Et quand le véhicule arrive,  ceux qui s’y trouvaient depuis des heures,  assistent, impuissants,  à la vente du gaz à ceux qui avaient  donné  le pourboire.  Celui-ci dépend de la quantité de la bouteille, confie Barry Baldé, un ressortissant guinéen venu récupérer près de 20 bouteilles de gaz, dont  6 de 20 Kg, 5 de 12 kg et 8 de 5 kg.

Devant les regards inquiets de certaines personnes qui attendaient d’être servies, il chargeait ces bouteilles de gaz dans un tricycle communément appelé « Kavaki ». Pour Barry Baldé,  « acheter une bouteille de gaz actuellement nécessite au préalable que l’on négocie moyennant l’argent  avec le responsable ou le gérant du dépôt ».  

Eu égard de cette pénurie qui prend des proportions  inquiétantes, s’approvisionner en gaz butane est devenu un véritable chemin de la croix pour les Congolais. Car obligés de persuader les gérants des dépôts avec plusieurs billets de banque.  

Un homme  sortant de son véhicule de marque Rav4  avec  trois bouteilles, dont deux de 12 kg et une de 20 kg, a été vite servi  pendant que les autres continuaient d’attendre. « J’étais venu donner au gérant la somme de  5.000 mille francs CFA. Nous nous sommes convenus qu’il m’appellerait le jour de la livraison.  Après  avoir été servi, j’ai remis encore un billet de 10.000 francs CFA  au gérant comme récompense, parce qu’il a respecté notre accord.  On n’y peut rien,  il faut comprendre le système pour avoir  le gaz »,  explique-t-il.

Denise MBouna, cliente habitant  le quartier Moungali, a été témoin d’une bousculade impressionnante dans ce  dépôt de vente de gaz l’année dernière. Privés de cette ressource à cause d’une pénurie qui touche le Congo-Brazzaville, les habitants sont prêts à tout pour se procurer une bonbonne dans une atmosphère délétère.


Sur place, c’était la cohue. Les gens n’en sont pas venus aux mains, mais des insultes fusaient. Il n’y avait aucun agent de l’ordre  pour encadrer la vente, mais fort heureusement, il n’y a pas eu de débordement. À la fin, plusieurs personnes sont reparties environ  de 19 heures  bredouilles, certains en insultant les vendeurs de corrompus.  Pendant ce temps, le gérant a fait semblant de fermer  son dépôt, dans l’attente des clients  ayant consignés les bouteilles.  Celui-ci  pouvait  se frotter les mains car, en sous de l’argent de vente de gaz, il  a encaissé à travers ses manigances plus de 200.000 milles de  francs CFA.