Que va dire Sassou N’Guesso ce 17 décembre devant le parlement ?
Le président Denis Sassou N’Guesso brossera, le 17 décembre, devant le parlement réuni en congrès, l’état de la nation. Que dira-t-il à la représentation nationale au moment où beaucoup d’interrogations se murmurent sur le quotidien des Congolais ? Un message d’espoir vaudra la peine.
L’adresse du chef de l’Etat est conforme à la Constitution, notamment l’article 94 qui lui donne le droit de faire l’état de la nation, une fois l’année. L’Assemblée nationale et le Sénat où le président Sassou N’Guesso dispose d’une confortable majorité seront réunis en congrès pour suivre ce message qui ne donne lieu à aucune question.
En fait, ce message sera délivré dans un contexte particulier. Plusieurs attentes de la population alimentent les spéculations des rédactions. Cette adresse arrive au moment où le Congo devra confirmer une bonne application de l’accord d’environ 225 milliards de francs CFA conclu en juillet dernier avec le Fonds monétaire international (FMI). Le dossier Congo devrait en effet passer fin décembre au conseil d’administration de l’institution de breton wood dans le but d’accorder la deuxième tranche de subvention au pays. Mais les nouvelles qui viennent du siège de FMI ne seraient pas bonnes pour le Congo qui attend le versement de 48 milliards de francs CFA.
Il paraît que le Congo travaille à la dure pour appliquer les 48 mesures retenues comme feuille de pointage par le FMI. Les résultats seraient donc mitigés. Pour autant, le FMI n’a pas dit qu’il cesserait sa coopération avec le Congo. On sait par ailleurs que depuis deux ans, le chef de l’Etat, en annonçant la crise financière, avait appelé les Congolais à se serrer la ceinture, et promis que le gouvernement fournirait des efforts pour que le pays sorte de ce bourbier.
Les indicateurs macro-économiques sont pour l’instant encore faibles. Selon les prévisions de la Banque mondiale, une croissance au dessus de 5% était attendue en 2019. Mais comme on le sait, le gros problème de la croissance économique au Congo, c’est qu’elle n’est pas inclusive, elle ne profite pas au plus grand nombre, et donc la pauvreté est toujours visible partout dans le pays.
Le paiement de la dette intérieure, destinée aux opérateurs économiques locaux, aurait permis de relancer l’économie nationale. L’absence des paiements continue dans ce cas d’asphyxier les activités économiques. Les hommes d’affaires réclament dans l’ensemble plus de 1.700 milliards de dette, mais les autorités qui tablent sur un nouvel audit ont toujours contesté ce chiffre. En attendant le décompte exact du dû, des bons de titrisation seront remis aux opérateurs économiques pour négocier des paiements avec l’Etat via les banques. C’est dans ce contexte morose que le président Denis Sassou N’Guesso devrait annoncer des bonnes perspectives pour 2020, et la population en a besoin pour continuer de garder bon espoir.
Le chef de l’Etat reviendrait-il sur la lutte contre la corruption ? Si oui, alors ce serait pour faire le point des déclarations déjà délivrées en avril 2016, et lors du dernier état de la nation en 2018. Mais on sait que la Haute autorité de lutte contre la corruption qui est la mesure n°29 du FMI n’est pas encore mise en place. De même, les dossiers montés par l’ancienne Commission anti-corruption n’ont connu aucun écho depuis la dissolution de cette institution ainsi que de son président Lamyr Nguele.
La population serait également tentée d’écouter le président de la République sur la lutte contre la pauvreté, notamment à travers le programme Lisungi qui va proposer des filets sociaux à plus de 8.000 personnes, dans sa deuxième phase qui vient d’être lancée à Brazzaville. Des projets de l’ordre de 250.000 francs CFA sont en cours de financement. C’est une action importante et salvatrice, vu l’ampleur de la pauvreté dans le pays. L’impact des programmes réalisés lors de l’embellie financière des années 2012-2015 a tendance à s’effriter, selon les experts de la Banque mondiale qui affirment que plus de la moitié des Congolais (51%) vivent avec moins de 2 dollars par jour.
Porte-voix de l’Afrique centrale sur les questions de changement climatique, Denis Sassou N’Guesso ne pourrait ne pas évoquer les inondations qui touchent plusieurs départements du pays, ainsi que la menace que constituent les érosions qui se déclarent dans les grandes villes, notamment à Brazzaville où les routes sont entrain de se casser. Un message de prise en charge à l’endroit des centaines des milliers des victimes dans la Likouala, la Sangha, la Cuvette et les Plateaux est forcément attendu par ces populations qui vivent actuellement les pieds dans l’eau et dont les plantations et l’élevage sont engloutis par les crues des fleuves et rivières. En dehors de l’assistance apportée par les organisations internationales, essentiellement le PAM et le HCR dans le nord, les victimes des inondations espèrent énormément des autorités. Même le voyage en hélicoptère du Premier ministre Clément Mouamba à Mossaka, dans la Cuvette, n’a pas rassuré cette population dont les députés continuent de lancer l’appel à l’aide.
Les Congolais voudraient aussi écouter leur président de la République sur les initiatives de dialogue menées actuellement par Martin Mberi, le secrétaire permanent du Conseil national de dialogue. Ce processus de consultations devrait s’achever en juin 2020 par un rapport adressé au chef de l’Etat qui décidera ou pas d’organiser un dialogue. En réalité, ce dialogue devrait être un acte charnière avant les élections de 2021. Entre 2015 et 2016, les votes avaient donné occasionné des violences dans les quartiers sud de Brazzaville et dans le Pool.